par le père Serge Boulgakov
« Roi du ciel, Consolateur, Esprit de vérité,
toi qui es partout présent et qui remplis tout,
Trésor de biens et Donateur de vie,
viens et demeure en nous,
purifie-nous de toute souillure
et sauve nos âmes, toi qui es bonté. »
Premièrement, quant à son
omniprésence, disons que cette prière, à l’exception du « Notre
Père », est la plus usitée et par conséquent la plus importante de toutes
les prières orthodoxes. On pourrait aussi ajouter que l’absence d’autres
prières au Saint Esprit la met dans un contexte tout particulier, ce qui
encadre encore davantage sa portée.
D’ailleurs, l’importance
particulière de cette prière est confirmée indirectement non seulement par son
usage mais, dans le même esprit, par son exclusion du cycle usuel des prières
de l’Église à des moments précis, notamment lors de la Semaine de Pâques et au
cours des semaines qui mènent à la Pentecôte.
L’Église omet alors
d’adresser cette prière au Saint Esprit en témoignage apparent du fait
qu’au cours de la semaine de Pâques et des jours qui la suivent, c’est-à-dire
après la Résurrection du Christ, nous sommes, de fait, passés du Royaume de
Grâce au Royaume de Gloire, au sein duquel tout baigne intrinsèquement dans le
Saint Esprit, ce qui fait qu’il n’est alors plus nécessaire de faire quelque
invocation spéciale au Saint Esprit, parce que Dieu est tout, en tout.
Il est maintenant temps de
regarder cette prière dans son ensemble : « Roi du ciel, Consolateur,
Esprit de Vérité, toi qui es partout présent et qui remplis tout, Trésor des
biens et Donateur de vie, viens et demeure en nous. Purifie-nous de toute
souillure et sauve nos âmes, toi qui es bonté. »
La première partie de la
prière, soit l’invocation « Roi du ciel, Consolateur, Esprit de
vérité… « renferme un enseignement dogmatique sur la Troisième Hypostase
comme étant Dieu véritable (« Roi du ciel »). Le Consolateur, dans la
perspective de son amour hypostatique entre le Père et le Fils, le Saint Esprit
grâce auquel s’atteint et se révèle la spiritualité de l’Esprit divin
tri-hypostatique, est pour sa part l’Esprit de vérité dans sa relation avec la
Deuxième Hypostase, qui est le Verbe et la Vérité.
La seconde partie de la
prière, « …qui es partout présent et qui remplis tout, Trésor des biens et
Donateur de vie «, témoigne plus particulièrement de l’activité du Saint
Esprit dans le monde. Tout d’abord, quant à son omniprésence : Dieu est
omniprésent mais chacune de ses divines hypostases possède une image spéciale
de cette présence hyperspatiale. Le Père est le pouvoir fondamental de volonté
dans la création du monde ; le Fils en est sa base ou son fondement idéal
(« sans lui rien n’a été fait ») ; le Saint Esprit est la force
active, qui pénètre tout et « qui accomplit tout ». Il est aussi
Donateur de vie; et pourtant le Dieu trine est lui-même la Vie éternelle, le
Créateur et le Donateur de vie. Alors que la Troisième Hypostase, celui qui
accomplit tout, est la Vie de la Vie au sein de la Sainte Trinité, de même il
est aussi la puissance spéciale de vie de chaque créature. Une hymne de
l’Église rappelle que « C’est par le Saint Esprit que chaque âme
vit » (Anavathmi du 4e ton).
Toute réalité accompagnant
chacune de ces vies appartient au Saint Esprit, car il est la puissance réelle.
Si la vie en tant que telle est la plus grande bénédiction, il est le
« Trésor inépuisable de tous les biens », ce qui inclut non seulement
le don naturel de la vie, mais aussi les dons de la grâce qui nous est donnée
par le Saint Esprit et qui représente la puissance de la vie.
Cette partie de la prière
décrit, pourrait-on dire, l’activité objective du Saint Esprit dans le monde et
sa présence au sein du monde, alors que la dernière partie de la prière traite
du domaine du subjectif, notamment de la réaction des hommes et leur
acceptation du Saint Esprit, pour lui demander le salut personnel (« viens
et demeure en nous, purifie-nous de toute souillure et sauve nos âmes… »).
Si la vie chrétienne
consiste dans l’acquisition du Saint Esprit, selon les paroles de saint
Séraphim de Sarov, et si en même temps la grâce ne force jamais personne, alors
le désir et l’effort des hommes sont également nécessaires pour en venir à
accepter cette grâce et cela doit se refléter en premier lieu dans la prière.
De dire « Viens et demeure en nous » expose une prière en vue d’une
réponse active du Saint Esprit et une invocation de l’Esprit Saint pour
l’obtention de l’inspiration qui porte fruit dans la créativité humaine.
Le feu du Saint Esprit
brûle notre nature pécheresse et nous purifie de tout péché. Par conséquent la
demande de l’inhabitation du Saint Esprit en nous inclut aussi cette autre
demande, « purifie-nous de toute souillure », afin que nous soyons
purifiés de nos péchés. Ainsi, une telle habitation du Saint Esprit en nous est
notre salut. Cette demande est la dernière de la prière. Elle est inclusive et,
en fait, représente un condensé de toute la prière.
On place habituellement
cette prière au début de toute chose bonne que nous entreprenons,
particulièrement les études, les exposés, les réunions publiques etc.
Père Serge BOULGAKOV, Sobornost (Fellowship de
Saint-Alban
et Saint-Serge), No 24, juin 1934.
Traduction : frère Élie
Marier.
Première publication en français.
Source: http://www.pagesorthodoxes.net/priere/priere-boulgakov.htm
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