En quoi, demandons-nous, résident la séduction particulière et l'efficacité de la Prière de Jésus ? Peut-être avant tout en quatre points : premièrement, dans sa simplicité et sa souplesse ; deuxièmement, dans son caractère complet ; troisièmement, dans la puissance du Nom ; et quatrièmement, dans la discipline spirituelle de la répétition persévérante. Reprenons ces points dans l'ordre.
[NB les points 1 et 2 sont présentés dans un précédent article, ici ne figurent que les extraits du point 3. Le point 4 sera l'objet d'un prochain article]
[NB les points 1 et 2 sont présentés dans un précédent article, ici ne figurent que les extraits du point 3. Le point 4 sera l'objet d'un prochain article]
3. La puissance du Nom
" Le
Nom du Fils de Dieu est grand et sans limites et soutient l'univers
entier. "
Ainsi est-il affirmé dans le Pasteur de Hermas, et nous
n'apprécierons pas le rôle de la Prière de Jésus dans la spiritualité orthodoxe
à moins que nous n'ayons quelque intuition de la puissance intrinsèque et de la
force du Nom divin.
Si la Prière de Jésus est plus efficace que d'autres
invocations, c'est parce qu'elle contient le Nom de Dieu.
Dans
l'Ancien Testament, comme dans d'autres cultures
anciennes, il y a une identité effective entre l'âme de l'homme et son nom.
Toute sa personnalité, avec toutes ses particularités et toute son énergie, est
présente dans son nom. Connaître le nom d'une personne c'est avoir une
intuition précise de sa nature, et, par là, se faire une relation solide avec
elle - avoir même, peut-être, un certain contrôle sur elle. C'est pourquoi le
mystérieux messager qui combat avec Jacob au gué de Jacob refuse de révéler son
nom (Gn 32,29). La même attitude se reflète dans la réponse de l'ange à Manoah
: " Pourquoi me demandes tu mon nom, sachant qu'il est secret
? " (Jg 13,18). Un changement de nom indique un changement décisif
dans la vie d'un homme, comme lorsque Abram devient Abraham (Gn 17,5), ou que
Jacob devient Israël (Gn 32,28). De la même manière, Saul après sa conversion
devient Paul (Ac 13,9) ; et un moine à sa profession reçoit un nom
nouveau, habituellement non choisi par lui, pour indiquer le renouveau radical
où il est engagé.
Dans la
tradition hébraïque, faire quelque chose au nom d’un autre, ou invoquer son nom
et s'en recommander, sont des actes d'une puissance et d'un poids extrêmes.
Invoquer
le Nom de Dieu avec attention et délibérément, c'est se mettre en sa présence,
s'ouvrir à son énergie, s'offrir comme un instrument et un sacrifice vivant
entre ses mains. Si ardent était le sens de la majesté du Nom de Dieu dans le
judaïsme tardif, que le " tétragrammaton " n'était pas prononcé
tout haut au service de la synagogue : le Nom du Très-Haut était considéré
comme trop redoutable pour être prononcé.
Cette
compréhension hébraïque du Nom passe de l'Ancien Testament au Nouveau. Les
démons sont chassés et les hommes guéris par le Nom de Jésus, car le Nom est
puissance.
C'est
cette révérence biblique pour le Nom qui forme la base et le fondement de la
Prière de Jésus. Le Nom de Dieu est essentiellement lié à sa personne et ainsi
l’invocation du Nom divin possède un authentique caractère sacramentel, servant
en tant que signe effectif de sa présence et de son action invisible. Pour le
croyant chrétien aujourd'hui, comme aux temps apostoliques, le Nom de Jésus est
puissance.
Le Nom
est puissance, mais une répétition purement mécanique ne sera d'aucun effet par
elle-même. La Prière de Jésus n'est pas un talisman magique. Comme dans toutes
les opérations sacramentelles, la coopération de l'homme avec Dieu est requise
à travers sa foi active et son effort d'ascèse. Nous sommes appelés à invoquer
le Nom avec recueillement et vigilance intérieure, en enfermant la pensée dans
les paroles de la Prière, sachant qui est celui à qui nous nous adressons et
qui nous répond dans notre coeur.
Cette
persévérante fidélité prend la forme, avant tout, d'une attentive et fréquente
répétition. Christ dit a ses disciples de ne pas utiliser les
" vaines répétitions " (Mt 6,7), mais la répétition de la
Prière de Jésus, quand elle est faite avec sincérité et concentration
intérieures, n'est absolument pas " vaine ". L'acte de la
répétition incessante du Nom a un double effet : il unifie davantage notre
prière et en même temps la rend plus intérieure.
Pour la présentation biographique de Mgr Kallistos Ware, cliquez ici…
Extraits tirés de : WARE Kallistos, in Elisabeth Behr-Sigel, Le lieu du coeur :
Extraits tirés de : WARE Kallistos, in Elisabeth Behr-Sigel, Le lieu du coeur :
Initiation à la spiritualité de l‘Église orthodoxe, Paris, Cerf, 1989.
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