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"Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse, que son visage s'illumine pour nous ; et ton chemin sera connu sur la terre, ton salut, parmi toutes les nations. Que les peuples, Dieu, te rendent grâce ; qu'ils te rendent grâce tous ensemble !" (Psaume 67)

jeudi 25 février 2016

Quand le travail devient prière

par le métropolite Michel Laroche


Une journée, qu'elle se passe au bureau ou au foyer, qui ne commence pas dans la prière, est une journée mal commencée. Et elle ne peut être fructueuse, à moins que, se ressaisissant, le croyant se souvienne enfin de Dieu. Il convient de confier au Seigneur, dans la prière, toutes ses difficultés et de lui demander l'éclairage de sa grâce et de son discernement. Alors, certainement, Dieu montrera ou inspirera la juste solution des problèmes.

Prier au bureau, pour que le Seigneur indique le meilleur chemin parmi les tâches. Soumettre à Dieu ses problèmes de travail permet à l'homme de ne pas exclure Dieu de son travail. Cette "exclusion" est si vite arrivée ! Combien de chrétiens font cette dichotomie entre le travail et la vie spirituelle ! Celui qui demande à Dieu de l'éclairer dans son travail témoigne lui-même qu'il ne rougit pas du Seigneur devant les hommes. Il introduit Dieu dans toute sa vie. C'est sa vie entière qui devient alors une magnifique prière au Seigneur.

Il peut y avoir un état de rupture dans la vie spirituelle si la prière dans le travail n'est pas observée. En effet, si l'être humain ne prie pas durant le moment très important de sa vie qu'est le travail, il s'asphyxiera. L'homme édifie souvent deux mondes incompatibles, un monde profane avec ses lois qui s'opposent à celles de Dieu, et un monde spirituel illusoire, qui a ses lois absentes du monde. L'homme doit sacraliser le profane. Il n'y a pas un domaine où Dieu ne puisse être et régner. Prier dans le travail est une nécessité absolue de la vie spirituelle. Mais davantage encore, prier dans son travail, c'est faire de ce travail une prière. 

C'est le sens du commandement de l'apôtre Paul: "Priez sans cesse." Sans cesse, cela signifie bien: en toute occasion. Par cette prière, Dieu fait pénétrer dans l'homme les arrhes de la prière perpétuelle, de l'état de prière. Toute la journée paraît alors transfigurée d'une lumière que les yeux ne voient pas, mais que l'âme voit clairement. Tout paraît irradié de lumière et de douceur Le travail prend une toute autre dimension. Il apparaît comme un lieu de sanctification dans lequel Dieu est présent.

Extraits tirés de : LAROCHE, M., Une seule chair, Paris, Nouvelle cité, 1984, p. 65-75.

lundi 15 février 2016

Quand le sens intellectuel refleurit

En guise d'introduction et pour bien comprendre le propos qui suit, on ne saurait trop rappeler que sous la plume des Pères tout ce qui est "intellectuel" et "intelligible" se rapporte à cette faculté de l'esprit qu'est l'intelligence mais qui n'a pas tout à fait le même sens que ce que l'on entend dans le langage courant. Pour les Pères l'intelligence est la double faculté de penser le monde et de contempler Dieu, elle n'est donc pas seulement cognitive mais éminemment spirituelle. (Ndlr)


par Calliste le Patriarche

"Bienheureux l'homme dont le sens intellectuel a refleuri grâce à l'admirable hèsychia*. Il est retourné pour ainsi dire en lui-même et vit par l'inspiration est l'impulsion de l'Esprit. Redressant les dispositions de l'âme, éveillant l'intelligence et transformant aisément le coeur. Un tel sens est par la grâce le fruit d'une réflexion saine, dès lors que celle-ci s'envole vers le divine. Mais il ne peut revenir à lui-même sans l'expérience de l'hèsychia et la pureté que la grâce donne à l'intelligence. Cela lui est plus impossible qu'à un homme de nager dans l'air. Avec le sens intellectuel, se souvenir de Dieu et contempler Dieu est chose efficace et utile. Mais sans lui, comme si l'on oubliait Dieu, le souvenir de Dieu est d'avantage ignorance et cécité que contemplation et connaissance. 

Celui qui par la grâce a trouvé ce sens divin, on peut dire qu'il a trouvé Dieu. Il n'a pas besoin de paroles. Il se tient près de Dieu. Il a choisi de célébrer la liturgie divine. Il embrasse le silence, ou plutôt il se tait même quand il ne le veut pas. L'Esprit de Dieu demeure en lui. L'amour, la paix, la joie spirituelle se lèvent en lui. Il vit une autre vie que la vie habituelle et commune. Il se réjouit en Dieu. Et ses yeux voient la lumière intellectuelle. Car eux-mêmes sont intellectuels. Son coeur porte le feu. La simplicité, l'immuabilité, l'infini, l'absence de limites et de commencement, l'éternel, s'unissent merveilleusement en lui pour le ravir. Les larmes ne cessent de couler de ses yeux. Il n'en a pas moins dans le coeur la source de l'eau vive, de l'eau spirituelle. Il retrouve l'unité et la totalité en s'unissant à l'intelligible. Il est entouré de la lumière de l'unique. Il jouit des délices plus hautes que le monde. Il est ravi par l'extase, il brille de joie, émerveillé, hors de lui, d'être absorbé par Dieu.

Celui qui a goûté cela comprendra et célébrera justement Dieu Très-Haut, hors de toute figure, de toute qualité, de tout âge, de toute quantité, simple, sans forme, infini, illimité, insaisissable, intangible, invisible, ineffable, inexplicable, sans commencement, éternel, incréé, incorruptible, incompréhensible, insondable, plus haut que l'être, plus que puissant, plus que bon, plus que beau. A lui la gloire et la louange dans les siècles."

Calliste le Patriarche, Philocalie des Pères neptiques, Bellefontaine, 2005, T. B.4, p. 675.


*Hèsychia: lutte contre les passions de l'âme pour atteindre la paix intérieure et le repos impassible.



mardi 9 février 2016

"Ils allèrent de village en village annonçant la bonne nouvelle" (Luc 9,6)

Par Carlo Caretto



L'homme sans Dieu est un poumon sans air, un oeil sans lumière un coeur sans amour. Celui qui possède Dieu en lui comprend cela à fond, et il se demande comment on peut vivre dans Lui. C'est là que nait tout élan vers l'apostolat.
Il ne s'agit pas de transmettre une formule, mais "un être", une "paix", une "lumière". On évangélise par sa propre vie avant d'évangéliser par la parole. Celui qui réduit l'Evangile à des formules sera un froid administrateur et non point un prophète. Jésus est venu apporter le feu sur la terre et non point le catéchisme.
Celui qui se contente de faire le catéchisme sans l'annoncer dans sa propre vie écrit sur un sable que le vent de la passion dispersera. Les tonnes et les tonnes de catéchismes qui ont été versées dans les paroisses et ruminées dans les séminaires nous ont conduits à la crise actuelle. Le catéchisme sans vie et sans témoignage est comparable à un remède que l'on donnerait à un mort.
C'est la foi qui fait de nous des vivants, non la culture religieuse, fût-elle profonde comme la mer. Tu dois transmettre ta contemplation, non point ta sagesse, encore moins ta culture. Seul celui qui contemple le visage de Dieu et en reste comme extasié peut dire efficacement à son frère: "Viens voir, et tu comprendras par toi-même combien c'est beau !" Entrainer les autres dans la contemplation, c'est l'âme de tout apostolat. Et tu ne peux le faire que si d'abord tu contemples toi-même. "Viens voir, viens essayer, viens écouter, viens avec moi sur la montagne sainte." Et ce qui convainc le frère de te suivre, c'est la grâce de Dieu qui ne manque jamais et ta conviction, ton expérience, ton exemple qui... ne sont jamais de trop.
Le Christ est le soleil de la terre, et tout homme, dans sa nuit, aspire à quelqu'un ou à quelque chose qui puisse refléter pour lui cette lumière en l'accueillant auparavant. Faire en sorte que la lumière de Jésus vive en toi, c'est la condition indispensable pour que tu puisses, à ton tour, éclairer quelqu'un d'autre près de toi. Ne cherche rien d'autre si tu veux être apôtre.
 Ce n'est point ta sagesse qui comptera, c'est ta possibilité d'accueillir la lumière de Dieu qui vient à toi dans le Christ. Et elle viendra surtout si tu vis les Béatitudes qui sont la synthèse la plus pure et la plus fulgurante de l'Evangile et de la pensée de Jésus. Commence donc à les réciter, et puis efforce-toi de les vivre.


("Au-delà des choses", Apostolat des éditions, 1973, p.181s.)